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samedi 5 juillet 2008

Polémique : mort aux psys ?

Publié le 03/07/2008 dans le N°1868 du Point

C'est une bombe à retardement que les psychanalystes pensaient avoir désamorcée. Il y a cinq ans, la profession s'était élevée contre l'amendement, déposé par le député UMP Bernard Accoyer, qui voulait réglementer la psychothérapie. La loi sur le titre de psychothérapeute ne fut jamais appliquée, faute d'un décret. Mais le Conseil d'Etat devrait remettre en selle ce décret. L'arrêté qui doit suivre provoque la colère des psychanalystes. L'un des plus éminents prend la plume dans les colonnes du Point.

Jacques-Alain Miller

Le « psy » est devenu pour les Français un personnage familier. Non pas que l'on sache toujours précisément ce qui distingue le psychanalyste et le psychothérapeute, le psychiatre qui donne des médicaments et le psychologue qui n'en donne pas. Dans l'opinion publique, le psy, c'est d'abord quelqu'un qui vous écoute.

C'est quelqu'un à qui se confier, à qui se fier, devant qui on peut se livrer en toute liberté. Quelqu'un qui aide la souffrance (ou l'énigme) qui vous habite à s'exprimer et à se mettre en mots. Quelqu'un qui vous reçoit en tant que vous êtes un être à part, une exception, valant par elle-même, pas n'importe qui, pas un numéro, pas un exemplaire de votre classe d'âge ou de votre classe sociale. Dans un monde où chacun sent bien qu'il est désormais jetable, la rencontre avec le psy reste une clairière, une enclave intime, on peut même dire une oasis spirituelle.

Devant l'ampleur de ce phénomène de société, les grandes institutions et les grandes entreprises ont voulu avoir leurs psys. Mais le public ne s'y trompe pas ; il sait bien quand le psy sert d'abord les intérêts d'un maître et quand il est d'abord au service de celui qui lui parle.

Eh bien, ce monde est menacé de finir. Sachez que, dans les profondeurs de l'Etat, des officines obscures travaillent d'arrache-pied à la mise au point d'un prototype encore secret, destiné à mettre progressivement au rancart les psys d'antan : et le psy qui, au nom de son autonomie professionnelle, résiste à sa hiérarchie ; et le psy génial, ne devant sa clientèle qu'au bouche-à-oreille ; et le psy libéral, qui ne doit de comptes qu'à son analysant. Les psys à la poubelle ! Place au techno-psy !

Le techno-psy n'aura pas pour fonction d'accueillir chacun dans la singularité de son désir : quelle perte de temps ! quel mauvais ratio coût-profit ! et puis, guérir avec des mots, c'est de la sorcellerie ! Non, le techno-psy n'écoute pas, il compte, il étalonne, il compare. Il observe des comportements, il évalue des troubles, il repère des déficits. Autonomie zéro : il obéit à des protocoles, fait ce qu'on lui dit, recueille des données, les livre à des équipes de recherche. Les appareils de l'Etat sont là dès les premiers pas de sa formation, et il leur restera soumis au fil du temps par des évaluations périodiques. La vérité est que le techno-psy n'est pas un psy : c'est un agent de contrôle social total, lui-même sous surveillance constante. Je sais : on croirait de la science-fiction. Même Staline n'a pas osé ça. Encore plus fort que la Stasi : elle posait des micros, là on vous branche directement un technicien sur le cerveau. C'est pourtant ce à quoi tend très précisément le texte de l'arrêté qu'un conclave de fonctionnaires de la Santé et de l'Enseignement supérieur se vante dans Paris de faire signer par leurs ministres, dans la moiteur du mois d'août.

Ce beau projet repose sur un tour de passe-passe. Il ne suffit pas de programmer la mort du peuple psy : pour que rien n'en subsiste, il faut encore le dépouiller de son nom. Techno-psy, je te baptise... psychothérapeute ! Dès que le Conseil d'Etat aura adopté le décret d'application de la loi sur le titre de psychothérapeute, les masques tomberont : par simple arrêté ministériel, ce sera l'an I de l'ère du techno-psy.

On songe à Brecht : le gouvernement, mécontent du peuple, décide de le dissoudre et d'en élire un autre. Ou encore à Lewis Carroll : « La question, dit Alice, est de savoir si vous avez le pouvoir de faire que les mots signifient autre chose que ce qu'ils veulent dire. - La question, riposta Humpty Dumpty, est de savoir qui sera le maître... Un point, c'est tout. »

Le pire, pourtant, n'est pas sûr. Il m'étonnerait que Roselyne Bachelot, que Valérie Pécresse veuillent attacher leurs noms à cette infamie. Et puis, il y a aussi cette jeune femme qui a témoigné publiquement de ce qu'elle devait à la psychanalyse. Devenue la « reine de coeur » de ce pays, elle ne dira pas : « La psychanalyse ? Qu'on lui coupe la tête ! »

mercredi 25 juin 2008

17 Meeting en France et en Belgique

Vous trouverez ici la liste des meeting organisés dans toute la France et en Belgique entre avril et juin 2008, à la suite des meeting à la mutualité :

> Les meetings à Dijon et à Rennes ont eu lieu en mars et en avril
>
Compte rendu du Meeting de Rennes

> Nice, samedi 10 mai, 14h à 19h, Parc Phoenix, salle Linné
“Contre la mise aux normes et le formatage, le chiffrage et l’évaluation généralisée, le comportementalisme et le cognitivisme. Pour la clinique du sujet et la création”
(ECF (UP), ACF, Section clinique, Association de praticiens, CPCT)

> Compte rendu du Meeting de Nice

> Marseille, samedi 17 mai, 10h-13h et 15h-18h
Faculté de droit, 112, La Cannebière, 13001 Marseille
“Quelle liberté pour le sujet à l’époque de la folie quantitative ?”
(ECF (UP), ACF, Section clinique, Association de praticiens, CPCT)
> Compte rendu du meeting de Marseille

> Toulouse, samedi 17 mai, 15h à 20h, salle municipale de Barcelone
“Il faut défendre les libertés. Compté, mesuré, codé, standardisé, contrôlé : Comment vivre au XXIème siècle ?”
(ECF (UP), ACF, Collège clinique de Toulouse, Librairie “Ombres blanches”)


> Corte, samedi 24 mai, 14h à 19h, Université Pasquale Paoli, Amphithéâtre Ettori
“Pour que vive la psychanalyse – Un printemps lacanien”
(ECF (UP), ACF, a criatura (CEREDA), laboratoire du CIEN “L’enfant auquel vous avez pensé”)
>
Compte rendu du Meeting de Corte


> Nantes, samedi 24 mai, 13h30 à 19h, Amphithéâtre du Centre des Salorges
“Guerre dans la civilisation : La psychanalyse face aux défis de nos sociétés démocratiques au XXIème siècle”


> Angers, vendredi 30 mai, 20h-23h, Salons Curnonsky, place Maurice Saillant, 49100 Angers
“Formatés, standardisés, évalués, ... : Sommes-nous des numéros ?”
(ECF (UP), ACF, Association de praticiens, UFORCA-Angers)

> Compte rendu du Meeting d'Angers


> Reims, samedi 31 mai, 14h à 18h, La Comédie, Chaussée Bocquaine
“Que vaux-tu ?”
(ECF (UP), ACF, CPCT, Association de praticiens, Section clinique)
> Compte rendu du Meeting de Reims


>Rouen , vendredi 6 juin, 20h30 à 23h, Hôtel des Sociétés savantes, 190, rue Beauvoisine, Rouen
“Contre les ravages de l’usage généralisé de la quantification”
(ECF (UP), ACF, Association de praticiens, Antenne clinique de Rouen)


> Lyon, samedi 7 juin, 14h30 à 18h, Amphithéâtre de la SEPR (Société d’Enseignement Professionnel du Rhône), 48 rue du Professeur Rochaix
“Pour que vive la psychanalyse”
(ECF (UP), ACF, Association des praticiens Rhône-Alpes, Section Lyon-Grenoble-Valence, Délégation Rhône-Alpes du Syndicat national des psychothérapeutes)


> Montpellier, samedi 7 juin, 14h à 18h30, Palais des Congrès, Corum de Montpellier
“Quelle civilisation pour demain ? Une société sans sujet ? Noter, évaluer, prévenir, ..., punir”


> Strasbourg, samedi 7 juin, 14h30 à 17h30, Palais Universitaire, Université Marc Bloch, salle Pasteur
“La psychanalyse menacée à l’Université : demain, qui seront nos psys ?”
(ECF (UP), ACF, Section clinique, Association de praticiens, InterCoPsychos, les Psychologues freudiens)


> Bordeaux, samedi 14 juin, 14h à 19h, Maison cantonale de La Bastide, 20 rue de Chateauneuf, 33100 Bordeaux
“La psychanalyse avec la civilisation contre l’évaluation”
(ECF (UP), ACF, UFORCA-Bordeaux, le Champ freudien,

Association de praticiens, InterCoPsychos, les Psychologues freudiens)


> Bruxelles, samedi 14 juin, Palais des Beaux Arts, 23 rue Ravenstein, 1000 Bruxelles, 10h-13h et 15h-18h “Troubles de la conduite” : dangers, impasses, dérives” - Meeting bilingue français/néerlandais - traduction simultanée
(ECF (UP), ACF, Section clinique, Antennes cliniques de Mons-Namur-Liège, Kring voor Psychoanalyse van de NLS, Centre de thérapeutique et de guidance de Charleroi, Zazie (groupe de recherche du réseau CEREDA), RI3, RIPA, CPCT, Unité psychanalytique d’Orientation (Bruxelles), Antenne 110, Le Courtil, Quarto) et plus de 50 autres associations

> Voir le site : www.forumpsy.be


> Clermont-Ferrand, samedi 21 juin, 14h à 19h, Corum Saint-Jean, 17 rue Gautier de Biauzat, 63000 Clermont-Ferrand
“Contre l’évaluation”
(ECF (UP), ACF, Section clinique, InterCoPsychos, CIEN, CEREDA)


> Vannes, samedi 21 juin, 13h30 à 17h
“Évaluer, réformer,contrôler, rentabiliser : Des nouvelles règles pour la société ?”
(ECF (UP), ACF, Association de praticiens, Collectif des psychologues du Morbihan)

> Île de France
> Compte rendu du Meeting en île de France


mercredi 4 juin 2008

Meeting en île de France : le 14 juin

L’ACF-IDF organise un meeting, avec le concours de la Section Clinique de Paris-Ile de France, du CPCT-ado, de la SARP, des Psychologues freudiens et de APCOF, le samedi 14 juin à la Maison des Jeunes et de la Culture de Colombes, de 14 à 18 heures, sous le titre, Évaluations : gare à l'utopire.
Les intervenants seront Jean-Daniel Matet, Yasmine Grasser, Pierre Sidon, Nathalie Georges et Marie-Hélène Bigot, José Rambeau, Normand Chabot, Laurence Hemmler.
Mais aussi Dominique Klingler, universitaire; Pierre Zaoui, de la revue “Vacarme”; Anaëlle Lebovits et Martin Quenehren du “Diable probablement”, et Karin Albou, auteur du film “La petite Jérusalem”.

On peut se rendre à Colombes par le train en 15 minutes à partir de la gare Saint Lazare; il y a ensuite 10 minutes à pied.
La MJC se trouve au 96, rue Saint Denis à Colombes.

(Renseignements: bernardjothy@hotmail.fr et au 01 42 77 01 99)

lundi 11 février 2008

Intervention de Robert Hue à la Mutualité


Robert HUE, Sénateur
Président de la Fondation Gabriel Péri

Paris, la Mutualité
Le 10 févier 2008


Mesdames, messieurs, chers amis,

C’est avec grand plaisir que j’ai accepté l’invitation de Jacques-Alain Miller à participer à cette rencontre. Pour une raison simple : mon engagement politique rejoint votre discipline, depuis toujours, dans le souci de l’émancipation de l’homme, de sa « désaliénation ».

Or, après une période faste d’extension des libertés individuelles, d’accroissement du niveau de vie général, de démocratisation de l’enseignement supérieur et de progrès de la protection sociale, cette émancipation est de plus en plus menacée, comme en témoignent notamment les attaques répétées contre l’enseignement de la psychanalyse au profit du cognitivisme.

Cette remise en cause est éminemment politique. Elle l’est au sens large, c’est-à-dire d’un choix de société. À ce propos, j’ouvre une courte parenthèse pour évoquer la violente campagne de dénigrement de la psychanalyse à laquelle s’est livrée le Parti communiste durant la Guerre froide, au nom, précisément, d’un choix de société. Le rapport des communistes à cette discipline était, à la fois, de fascination et de répulsion, et surtout de malentendus.

Le renouveau de la psychanalyse venait alors des États-Unis, où s’étaient exilés quelques-uns des grands théoriciens d’Europe, et son courant majoritaire proposait une interprétation particulière du plaisir, qui en faisait, selon lui, un facteur d’harmonie sociale. Les conflits de toutes sortes – entre époux, voisins, ouvriers et patrons – se voyaient ainsi réduits à une utilisation négative de l’agressivité, à un écart désagréable du moi, auxquels l’intervention du thérapeute allait mettre fin. Il n’en fallait pas plus pour stigmatiser la psychanalyse comme véhiculant des valeurs « paternalistes », « bourgeoises », et « individualistes » destinées à « anesthésier la lutte des classes ». L’intérêt de Louis Althusser pour la lecture lacanienne des théories de Freud mit heureusement fin à cette période, et le dialogue entre communistes et psychanalystes put reprendre.

Jacques-Alain Miller a récemment déclaré, dans un entretien à Libération, que s’il lui fallait choisir entre l’évaluation et le marché, il préfèrerait encore le marché. Je serais tenté de dire qu’il aurait alors les deux. Le second ne va pas sans la première ; ils sont intimement, structurellement liés. La « culture du résultat » constitue désormais le quotidien des salariés – et même maintenant des ministres – : leur activité est jaugée en permanence, et de manière le plus souvent chiffrée. Les ressources humaines évaluent les compétences, les performances et le « potentiel » de chacun. Le marché capitaliste, en ce qu’il promeut et se soumet au primat du quantitatif, a besoin, entre autres, de cette évaluation pour maîtriser les hommes.

La dernière phase de mutation du capitalisme, débutée dans les années soixante-dix, est désormais bien connue. La dénonciation de sa déconnexion de l’économie réelle, qui engendre quotidiennement tragédies sociales et souffrances multiples, est parfaitement fondée.

Mais cette description demeure partielle. La financiarisation du capitalisme, au-delà du fonctionnement purement économique, a encore renforcé le poids de son « discours », au sens lacanien. Permettez que je cite à ce propos la tribune du psychanalyste Pierre Bruno dans L’Humanité du 14 avril 2001 : « Le discours capitaliste, au sens de Lacan, n’est pas une somme d’énoncés, mais un lien social – un rapport social, disons, pour le lecteur plus familier de Marx. Ce qui caractérise ce discours, et le singularise à l’égard de tout autre, est, dit Lacan en 1972, je cite, “d’exclure la castration”. Il fait ainsi accroire au prolétaire, dépouillé de tout, qu’il peut, grâce au fonctionnement du système, s’enrichir jusqu’à pouvoir jouir de tout. Un tel discours relève d’un impératif quasi sadien, affiché ou masqué : “Tu peux jouir de tout en écrasant ton semblable, sachant que ton semblable peut jouir de tout en t’écrasant…” ». Fin de citation.

La logique quantificatrice est bien la logique même du capitalisme tel qu’il a évolué après la Seconde Guerre mondiale. Elle fonde tout à la fois une nouvelle conception de la production et de son pendant consommatoire.

Au niveau de la production, à la différence du taylorisme, et pour reprendre les formules du jargon contemporain du « management », la « mobilisation de l’intelligence » et celle du « savoir-être », qui inclut les compétences comportementales et relationnelles, sont considérées comme des facteurs-clés du développement de la productivité. En référence aux sciences cognitives, l’intelligence est tenue pour un simple mécanisme de traitement de l’information à optimiser selon les besoins de l’entreprise. Les sensations, les sentiments, les valeurs, sont pris en compte dans cette même logique qui résume l’homme au travail à une mécanique qu’on pourrait maîtriser et manipuler à loisir. L’une des facettes de la mutation du capitalisme s’exprime dans sa tendance à réduire les individus à des producteurs, et ces producteurs à des machines dont les paramètres de gestion peuvent être totalement connus et maîtrisés. L’entretien psychologique dans le cadre d’un bilan de compétence est un parfait exemple de l’instrumentation des savoirs psy par le marché, en l’occurrence celui du travail.

Mais la production croissante à l’infini s’étoufferait elle-même sans une consommation idoine. Le philosophe Bernard Stiegler a montré comment le capitalisme a progressivement pris en compte l’évaluation et la canalisation des affects pour soutenir, voire augmenter la consommation de biens. Il décrit ainsi concrètement le fonctionnement du discours du capitaliste tel que Lacan l’avait formalisé : « Aujourd’hui, dans les sociétés de modulation que sont les sociétés de contrôle, les armes esthétiques sont devenues essentielles : il s’agit de contrôler ces technologies de l’esthétique que sont par exemple l’audiovisuel ou le numérique, et, à travers ce contrôle des technologies, il s’agit de contrôler les temps de conscience et d’inconscience des corps et des âmes qui les habitent. ».

L’efficacité des techniques quantificatives pour gérer nos flux psychiques aboutit ainsi à une situation digne du Meilleur des Mondes : ceux dont l’exploitation fonde le système ne le pérennisent pas seulement en tant que producteurs, mais aussi en tant que consommateurs aux désirs suggérés qui en deviennent les promoteurs inconscients. Voilà la socialité qu’est en train de construire le dogme de l’évaluation : une sorte de nouvelle servitude volontaire, fièrement proclamée par le slogan de Nicolas Sarkozy, « travailler plus pour gagner plus » auquel on pourrait ajouter, dans un souci de véracité, « pour consommer plus ».

Si, en tant qu’idéologie dominante, « l’esprit du capitalisme a en principe la capacité de pénétrer l’ensemble des représentations mentales propres à une époque donnée, d’infiltrer les discours politiques et syndicaux, de fournir des représentations légitimes et des schémas de pensée aux journalistes et aux chercheurs, si bien que sa présence est à la fois diffuse et générale », comme l’écrivent avec raison les sociologues Luc Boltanski et Eve Chiapello, la résistance dans laquelle, vous, psychanalystes, êtes entrés voilà deux ans a toutes les chances, à mon avis, de durer.

Pour contrer cette hégémonie qui infiltre tout et ouvrir d’autres perspectives que la généralisation de cette « culture de l’évaluation », de ce « nouvel esprit du capitalisme », il faut que psychanalystes et politiques progressistes prennent conscience de la convergence de leurs combats. À ce titre, peut-être serait-il profitable de réfléchir sur la place de la psychanalyse dans le dispositif de santé publique, afin d’en élargir l’accès au plus grand nombre. Car la souffrance psychique concerne l’ensemble des couches sociales, et les plus fragiles sont aussi les plus touchées par les transformations du monde du travail et les nouvelles techniques de marketing que j’évoquais à l’instant.

Convergence de combat, disais-je, mais aussi de sujet, puisque comme l’écrit Jean-Claude Milner dans son Lacan et la science moderne, je cite : « Le sujet de la psychanalyse est le sujet forclos de la science », c’est-à-dire le sujet qui échappe par essence à l’action de la science, et en particulier à cette grimace de science qu’est la culture de l’évaluation. Ce sujet, c’est, en des mots simples, l’être de l’être humain, l’humanité de l’humain. C’est donc aussi le sujet d’une politique de progrès, et c’est pourquoi vous pouvez, dans votre lutte contre cette culture de l’évaluation, contre ce qu’elle sert, compter sur le progressiste que je suis.

Communiqué n°21

grand meeting à la mutualité
les 9 et 10 février

Communiqué n°21

Chers collègues, le Meeting à la Mutualité a été un grand succès. Par la participation : un public qui a dépassé les 1 300 personnes dès samedi après-midi. Par son déroulement : fluide, entrecoupé de discussions, aéré et amusé. Par son contenu : bien des idées stimulantes ont été échangées. Je dis ma gratitude à ceux qui ont compris l’importance du moment actuel et répondu à mon appel. Avec ce Meeting, et avec la parution de LNA 8, nos adversaires ont pu mesurer notre capacité de riposte et notre détermination. Nous poursuivrons dans cette voie.

Bien à vous, Jacques-Alain Miller, le 11 février 2008

vendredi 8 février 2008

Programme du Grand Meeting


Grand Meeting à la Mutualité

Samedi 9 et dimanche 10 février de 10 h à 13 h et de 15 h à 18 h

“Une guerre idéologique oppose les quantificateurs, avec leur prétention croissante à régenter l’existence humaine dans tous ses aspects, et tous ceux qui ne plient pas devant la dictature des nombres. Le fanatisme du chiffre, ce n’est pas la science, c’en est la grimace.” J.-A. Miller

avec

Bernard-Henri Lévy, Philippe Sollers,

Catherine Clément, Jean-Claude Milner,

Christian Charrière-Bournazel, Gérard Miller,

Jacques-Alain Miller et d’autres…

Samedi matin

10 h : Carole Dewambrechies,

Ouverture

10 h 15 : Jacques-Alain Miller,

Ouverture 2

10 h 30 : LNA-Rédaction,

Que peut la psychanalyse dans le moment actuel ?

11 h : Éric Laurent,

Le calcul massif tue le sujet

11 h 30 : Charrière-Bournazel,

Vers une société de délation ?

12 h : Milner,

Les nouvelles sciences occultes

Samedi après-midi

15 h : Sollers,

Un État de déliquescence

16 h : Catherine Clément,

La rigueur du savoir

17 h : BHL,

Nouvelles figures de l’obscurantisme

Dimanche matin

La folie évaluationniste, l’Université sadisée

10 h - 13 h

avec Alain Abelhauser, François Ansermet, Roland Gori, Jean-Claude Maleval, Philippe Meirieu, Isabelle This

Dimanche après-midi

15 h : Yves-Charles Zarka,

Contre le cognitivisme

15 h 30 : Vincent de Gaulejac,

La politique contaminée par la gestion

16 h : Michel Chauvière, Qualité, évaluation, bonnes pratiques : l’intervention sociale en grande difficulté politique

16 h 30 : Christophe Deltombe,

Vers un lien social solidaire

17 h : Robert Hue,

La politique devant le dogme de l’évaluation

17 h 30 : Gérard Miller,

Qui veut la peau de Sigmund Freud ?

Inscription sur place : 60 (étudiant 20 )

Maison de la Mutualité

24, rue Saint-Victor Paris Ve

lundi 28 janvier 2008

Communiqué 19 & 20


le sarkozysme : un humanisme ?

ou le contraire ?

grand meeting les 9 et 10 février à la mutualité

Communiqué n°20

Chers collègues, le samedi après-midi, prendront la parole à la Mutualité Bernard-Henry Lévy, Catherine Clément, et Philippe Sollers. Ce dernier présentera et commentera un film réalisé sous sa direction ; le titre qu’il m’a communiqué : « Antidépresseur, formule chinoise forte ». Pour dimanche après-midi, Zarka prépare, me dit-il, « une charge terrible contre le cognitivisme ». Aussi : deux sociologues, Michel Chauvière et Vincent Gaulejac, viendront analyser les rapports entre la politique et la gestion aujourd’hui. Par ailleurs, le numéro 8 de LNA-Le Nouvel Âne - 64 pages, dont un dossier de 28 pages sur « L’Université sadisée par la police de l’évaluation » - vient de sortir de l’imprimerie. Belle allure. Il sera mis en vente en librairie le 7 février. Enfin, Le Nouvel Observateur de cette semaine me présente comme sarkophile déclaré : mais oui, sarkophile je le suis pour avoir écrit dans ce magazine, en 2002, un article prédisant l’élection de Sarkozy en 2007 si la gauche ne trouvait pas la réplique à un homme dont le style Can do (je peux faire) ringardisait le look languissant de tout le personnel politique de l’époque. Bien à vous, Jacques-Alain Miller, le 25 janvier 2008

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le sarkozysme est-il un humanisme ?
meeting pour la psychanalyse
et contre le cognitivisme
les 9 et 10 février à la mutualité

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Communiqué n°19

Chers collègues, le nouveau Bâtonnier des avocats de Paris, notre ami Christian Charrière-Bournazel, me confirme qu’il prendra la parole à la Mutualité, sur le thème : « Vers une société de délation ? ». Il interviendra samedi matin. D’autre part, le Président de la Fondation Gabriel-Péri, Robert Hue, s’exprimera dimanche après-midi, ainsi que le Président d’Emmaüs (successeur de Martin Hirsch), Christophe Deltombe. Bien à vous, Jacques-Alain Miller, le 24 janvier 2008

mercredi 23 janvier 2008

Communiqué n°18

le sarkozysme est-il un humanisme ?

meeting pour la psychanalyse

et contre le cognitivisme

les 9 et 10 février à la mutualité

Communiqué n°18

Chers collègues, le Président de la République annonçait le 8 janvier, dans sa conférence de presse, qu’il s’engagerait dans la campagne des élections municipales. Hier, il avait changé d’avis : “Je n’ai pas à m’en mêler”. C’est encourageant : voilà un homme qui n’a pas peur de se dédire à deux semaines d’intervalle. Nicolas S. est un sujet profondément original, qui n’a rien de convenu, un sujet non standard. En particulier, il n’a pas le sens des limites (“il n’existe pas de x tel que…”). La transgression lui est donc naturelle. Il bouscule toutes les conventions ; il pratique comme il respire le mélange des genres ; il croit, et fait croire, que “tout est possible” ; il convient parfaitement à une époque où l’on adule qui fait “bouger les lignes”. Il les fait si bien bouger qu’il n’y a pas pour lui de barrière étanche entre le oui et le non. Cela laisse de l’espoir. Il a pris parti pour l’évaluation généralisée, on ne voit pas pourquoi il ne pourrait pas en rabattre. Pour ce quantitativiste, le nombre que nous serons à la Mutualité comptera.
Bien à vous, Jacques-Alain Miller, le 23 janvier 2008

Communiqué n°17

grand meeting pour que vive la psychanalyse

9 et 10 février à la mutualité

Quelle politique de civilisation ?

“Réhumaniser” la société : comment ?

Cognitivisme ou Psychanalyse

Vivre sous Sarkozy

Communiqué n°17

Chers collègues, j’ai fait connaître cet après-midi au cabinet présidentiel l’existence du Meeting à la Mutualité, en demandant que l’on me dise une bonne fois si nous devons considérer que l’élimination de la psychanalyse à l’Université est programmée et ira à son terme, ou si le pouvoir politique interviendra, comme cela a été le cas par le passé. En effet, depuis 1991, les expertises effectuées au département de psychanalyse par des équipes cognitivistes lui ont toujours été défavorables, et ce sont les ministres successifs de l’Education nationale qui ont chaque fois décidé personnellement de ne pas suivre les recommandations de ces experts. En tout état de cause, nous ne laisserons pas couper les liens de la jeunesse avec la psychanalyse : ce serait consentir à la disparition à terme de notre pratique. Ou bien ce lien sera maintenu au sein de l’Université, ou bien nous agirons en dehors de cet appareil d’Etat, dans la société civile, sur le modèle de nos Sections cliniques. Quand l’Argentine était aux mains des militaires, tout un secteur universitaire privé s’était développé en marge de l’Université officielle, et cela n’a pas trop mal réussi à nos collègues. Si le sarkozysme laisse l’évaluation quantitative développer ses effets néfastes, eh bien, nous prendrons exemple sur les Argentins. Et comme nous ne vivons pas sous une dictature, mais en démocratie, nous saurons le dire haut et fort. Bien à vous, Jacques-Alain Miller, le 22 janvier 2008

lundi 14 janvier 2008

Communiqué n°15

grand meeting pour que vive la psychanalyse

9 et 10 février à la mutualité

Quelle politique de civilisation ?

“Réhumaniser” la société : comment ?

Cognitivisme ou Psychanalyse

Vivre sous Sarkozy

Communiqué n°15

Chers collègues, Bernard-Henri Lévy me confirme qu’il prendra la parole au Meeting samedi après-midi à 17h. Jean-Claude Milner parlera samedi en fin de matinée. Nouvelles annonces à venir cette semaine. Bien à vous, Jacques-Alain Miller, le 14 janvier 2008

vendredi 11 janvier 2008

Communiqué n°14

grand meeting pour que vive la psychanalyse

9 et 10 février à la mutualité

Quelle politique de civilisation ?

“Réhumaniser” la société : comment ?

Cognitivisme ou Psychanalyse

Vivre sous Sarkozy

Communiqué n°14

Chers collègues, notre grand Meeting de la Mutualité se tiendra dans un mois. Ce sera l’occasion de donner un coup d’arrêt à la “politique de civilisation” cognitiviste promue partout en Europe par les bureaucraties d’État - politique aussi autoritaire qu’utopique, qui met tous ses espoirs dans l’évaluation généralisée. Ce Meeting intervient au moment où le volontarisme de Nicolas Sarkozy se révèle curieusement dubitatif, divisé entre “réhumanisation” et quantification. Philippe Sollers a confirmé sa participation, avec un exposé sur “l’état de déliquescence que l’on voudrait nous faire valider”. Bien à vous, avec mes vœux pour la nouvelle année, Jacques-Alain Miller, le 11 janvier 2008

Samedi et dimanche 9 et 10 février

chaque jour de 10 à 13h et de 15 à 18h

maison de la mutualité 24 rue Saint-Victor Paris 5ème

Inscription : 60 € (étudiants : 20 €)

On pourra s’inscrire sur place ; on peut aussi dès maintenant adresser un chèque à : Le Forum des Psys, 15 place Charles Gruet - 33000 Bordeaux

mercredi 19 décembre 2007

Communiqué du Directeur du Dépt de psychanalyse, Paris VIII

Université de Paris VIII

département de psychanalyse

le directeur

Communiqué

du 19 décembre 2007

Le recteur Monteil m’a reçu hier après-midi. L’entretien était prévu pour durer une heure, il a duré le double.

M. Monteil m’a tenu un long discours sur sa carrière d’enseignant, de chercheur et de haut fonctionnaire, que j’ai pris en note, et dont il doit corriger aujourd’hui le texte pour publication dans mon journal, LNA-Le Nouvel Âne. Pour ma part, je lui ai expliqué dans quel contexte de pression évaluationniste de la part des psychologues cognitivistes j’avais écrit il y a 15 jours ma diatribe contre lui.

Je lui ai indiqué qu’il convenait de préserver la place, au demeurant modeste, de la psychanalyse à l’Université, et qu’à cette fin, il était indispensable de scinder la psychologie expérimentale et cognitiviste, d’une part, et, d’autre part, la psychologie clinique, la psychopathologie et la psychanalyse. Il n’a pas fait d’objection de principe à cette idée.

Nous avons longuement conversé. Il m’a remis un certain nombre de ses travaux scientifiques, la plupart en anglais. Je lui ai dit que je les lirai et en rendrai compte.

Dans les derniers moments de notre rencontre, je l’ai informé de la composition de l’équipe de visite que l’AERES dépêchait à l’équipe doctorale de mon département. Je lui ai dit que j’estimais cette composition inadéquate, et qu’il était inopportun à mon sens de soumettre à l’opinion d’un psychologue expérimental psychanalyste “autoproclamé” les travaux effectués sous la direction du fondateur de la principale organisation internationale lacanienne - seconde en importance dans le monde après celle créée par Freud voici un siècle.

Je lui ai fait part de mon intention de mettre publiquement en cause la composition de cette équipe, et d’en désigner nominativement les membres au cas où l’AERES persisterait dans son projet de leur faire évaluer notre activité universitaire. La persécution du département de psychanalyse par les cognitivistes a commencé en 1991; les ministres successifs sont à chaque fois intervenus personnellement en faveur du département; le moment est venu d’une solution institutionnelle globale et définitive.

Il a mis à ma disposition sa voiture et son chauffeur pour me ramener à mon domicile, après avoir tenu à me raccompagner dans la cour du 58, rue de Varenne. Je l’ai remercié de sa courtoisie.

Jacques-Alain MILLER

lundi 17 décembre 2007

Communiqué du Directeur du Dépt de psychanalyse, Paris VIII

Université de Paris VIII

département de psychanalyse

le directeur

Communiqué

du 17 décembre 2007

Répondant à l’aimable invitation de Mme Valérie Pécresse, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, j’ai eu l’honneur d’une audience dans son bureau de la rue Descartes, aujourd’hui en fin d’après-midi.

La ministre m’a permis de lui exposer à loisir les problèmes soulevés par l’action des évaluateurs dépêchés au département de psychanalyse comme à la plupart des formations universitaires de psychologie clinique et psychopathologie.

La nouvelle Agence d’évaluation qui a vu le jour cette année, l’AERES, a commencé de déployer à travers la France ses agents, “délégués scientifiques” et “visiteurs”. Leur légitimité et leur compétence sont souvent rien moins qu’éclatantes. Tous ont été sélectionnés et nommés dans des conditions dont on ne sait rien. Il paraît difficile d’arguer en leur faveur de la fameuse “évaluation par les pairs”. J’ai donné des exemples.

Le président de l’AERES a réuni mercredi dernier les responsables de toutes les équipes doctorales de la capitale. L’événement a mis en évidence l’attitude expectante de la communauté universitaire. Il est néanmoins perceptible que celle-ci s’inquiète de voir l’avenir de l’enseignement supérieur et de la recherche tributaire des méthodes et des choix d’une Agence nationale unique, hyper-centralisée, au fonctionnement particulièrement opaque. La dire indépendante présage la défausse.

Je n’ai pas caché à Mme Pécresse mon intention de faire appel à l’opinion éclairée : quoi de plus logique que d’évaluer les évaluateurs ? Quant aux divers personnages du cognitivisme français qui, sous couvert de l’AERES, ont voulu et préparé l’éradication des universitaires psychanalystes et cliniciens, ils auront tôt ou tard à répondre de leurs motivations devant le public, comme je suis moi-même disposé à le faire.

Il ne m’appartient pas de rapporter ici les propos de la ministre. Toujours est-il que Valérie Pécresse a su me donner le sentiment d’être écouté, et même entendu. “Je vous fais confiance”, lui ai-je dit en conclusion de notre entretien.

Jacques-Alain MILLER

jeudi 6 décembre 2007

Communiqué n°13

“résister aux cognitivistes”

grand meeting pour que vive la psychanalyse

9 et 10 février à la mutualité

Communiqué n°13

Chers collègues, plusieurs de nos collègues persécutés dans l’Université par les commandos cognitivistes prendront la parole au Meeting de la Mutualité, en particulier, à titre personnel, mon ami Roland Gori. D’autre part, j’ai invité à y parler le président de la Fondation Gabriel Péri, Robert Hue, l’ancien dirigeant du PCF. Nous aurons aussi des membres de la Fondation pour l’innovation politique, dont notre amie Catherine Clément, et, je l’espère, Jean-Didier Vincent. Et ce n’est qu’un début. Bien à vous, Jacques-Alain Miller, le 6 décembre 2007.

mercredi 5 décembre 2007

Communiqué n°12

“résister aux cognitivistes”

grand meeting pour que vive la psychanalyse

9 et 10 février à la mutualité

Communiqué n°12

Chers collègues, le secrétariat particulier de Valérie Pécresse m’a informé que la ministre désirait me rencontrer. J’ai proposé une autre date que celle qui m’était offerte ; la discussion est en cours ; il est question du lundi 17 décembre en fin de journée. J’augure bien de cette conversation, si du moins elle a lieu. Ce bon mouvement signifie en tous les cas que la ministre s’est affranchie de la méthode Monteil, consistant selon moi à “tuer sans phrase”. Bien à vous, Jacques-Alain Miller, le 5 décembre 2007

Communiqué n°11

“résister aux cognitivistes”

grand meeting pour que vive la psychanalyse

9 et 10 février à la mutualité

Communiqué n°11

Chers collègues, “La Lettre en ligne” de l’ECF diffusait hier ma première diatribe anti-cognitiviste. Je reçois ce matin un mail de notre collègue Rabanel que je vous communique aussitôt (voir ci-dessous). Par ailleurs, mon ami Saint-Clair Dujon me signale le colloque des Laboratoires de sciences humaines et sociales de l'ENS tenu le 30 novembre dernier, de 9 à 18h, sur le thème Evaluer, dévaluer, réévaluer l'évaluation. “En particulier, m’écrit-il, intéressante intervention de Barbara Cassin sur "la qualité est-elle une propriété émergente de la quantité?", où elle développe ce qu'est l'idéologie Google : une citation, c'est un vote ; un clic sur un site, c'est un vote. Le mode d'évaluation de la recherche entraîne le chercheur à prendre l'instrument d'évaluation pour but de la recherche (publier pour être cité, pas pour avancer). Pour la langue de l'évaluation, voir Klemperer (Victor), Lingua Tertii Imperii. L'enregistrement sonore de ce colloque devrait être mis sous une semaine (en principe) sur le site "diffusion des savoirs" de l'ENS”. Bien à vous, Jacques-Alain Miller, le 5 décembre 2007


Mail de Jean-Robert Rabanel ce matin, 10h37

Cher JA Miller,

Après lecture de vos réponses à “La Lettre en ligne”, je voudrais vous dire un mot au sujet de Jean-Marc Monteil. C’est d’abord un souvenir.

Lors de la création de la Section clinique de l’Institut du Champ freudien à Clermont-Ferrand, je vous avais demandé de faire un courrier au doyen de la Faculté des Lettres pour qu'il accepte de nous louer des salles. Celui-ci avait accédé à notre demande, tout en nous priant d’en référer au Président de l'Université de l'époque, qui était justement M. Monteil.

Au téléphone, celui-ci ne me fit pas d’objection, précisant que nous étions si différents que nous ne nous porterions pas tort. Il ajouta aimablement qu’il avait pu apprécier favorablement l'aide que j'avais apportée en tant qu’analyste à quelqu'un de son proche entourage.

C'est le seul contact que j'ai eu avec J.M. Monteil, et, comme vous le voyez, il a été empreint de courtoisie. J'ai connu ensuite le déroulement de sa carrière, à Bordeaux d'abord, puis à Paris. À l'Université Blaise-Pascal de Clermont, il avait créé, sur les ruines de l’Institut de psychologie appliquée, son Laboratoire de psychologie de la cognition ; il fut le Président de l’Université de 1992 à 1997. Il est ensuite devenu le recteur de Bordeaux, et il a écrit alors un important rapport intitulé “Propositions pour une nouvelle approche de l'évaluation des enseignants”, qu’il a remis à François Bayrou, ministre de l’éducation nationale. Je suppose que ce rapport est pour quelque chose dans sa nomination en juillet 2002 comme directeur de l’Enseignement supérieur. Le ministre qui l’a nommé était Claude Allègre. Il est devenu le 21 mars dernier le président du conseil de l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (AERES), poste qu’il a du quitter le 22 mai, au moment il était nommé chargé de mission auprès de François Fillon. C’est sans aucun doute l’homme de l’évaluation dans l’Université française. C’est son successeur au Laboratoire de Clermont, le Pr Fayol, qu’il a choisi pour superviser les nombreuses équipes de l’AERES qui vont toute l’année durant expertiser tous les cliniciens et psychanalystes universitaires. C’est leur triomphe.

On peut se demander comment la Faculté de psychologie de Clermont, où Foucault avait enseigné, qu’il avait marquée de son enseignement, avait pu devenir un bastion du cognitivisme. Voici ce qui s’est passé.

Pour le seconder à Clermont, Foucault avait choisi Mme Pariente. Celle-ci devint la directrice de l'Institut de Psychologie Appliquée. C’était une clinicienne, et nous l’avons toujours soutenue, Simone et moi, une ancienne normalienne, comme son mari, le philosophe Jean-Claude Pariente, dont vous connaissez la réputation, et qui est encore venu faire une belle conférence en mars dernier à l’Association Cause freudienne, sur la notion de nom propre, que nous allons publier. Mme Pariente aurait beaucoup de choses à dire sur son combat à Clermont, son éviction, et la suppression de l'Institut de Psychologie Appliquée au profit du Laboratoire de J.-M. Monteil.

René Haby, le premier ministre de l’éducation nationale sous Giscard, promoteur du “collège unique”, fut recteur de l’Université de Clermont. Alice Saunier-Séité, qui lui succéda aux Universités en 1978, refit la carte des Facultés de psychologie, et éradiqua de Clermont la clinique au profit du cognitivisme. Ce fut surprenant à l’époque, d’autant que Mme Pariente était giscardienne en politique alors que M. Monteil, lui, était connu pour être de tendance PS. Toujours est-il que c’est ainsi que la “Fac de psycho” de Clermont devint ce qu’elle est devenue.

C’est maintenant le Pr Fayol qui règne en amître absolu sur la psychologie à Clermont. De Monteil à Fayol, en 30 ans, pas un seul professeur, pas un seul maître de conférences, pas un seul assistant, pas un seul chargé de cours qui ait été clinicien. Le désert. C'est au point qu'il n'y a pas de DESS de psychopathologie à Clermont, cas unique selon Jean-François Cottes.

Bien cordialement.

Jean-Robert Rabanel

PJ : saisie sur ordinateur de votre lettre au doyen de la faculté des Lettres de Clermont, en date du 30 mars 1992

DEPARTEMENT DE UNIVERSITE DE PARIS VIII

PSYCHANALYSE

PARIS, LE 30 mars 1992

LE DIRECTEUR

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A Monsieur le Doyen de la Faculté des Lettres de Clermont-Ferrand


Monsieur le Doyen et cher collègue,

Je me permets de vous écrire au sujet d’une « Section clinique « à Clermont-Ferrand, qui se recommande du Département que je dirige à l’Université de Paris VIII.

Le Dr Jean-Robert Rabanel est connu et apprécié depuis des années de moi-même et de la plupart des membres de l’équipe doctorale « Psychanalyse et champ freudien » que j’anime au Département. En particulier, le Dr Rabanel a été invité à collaborer à la « Section clinique » de Paris, que nous avons créée dans le cadre du service de formation permanente de l’Université.

De nombreux psychanalystes ont voulu à leur tour créer de telles « Sections cliniques » à l’étranger. C’est ainsi que j’ai accepté de donner les auspices du Département à des « Sections » qui se sont ouvertes à Bruxelles, Madrid, Rome, et Barcelone. Ces établissements sont gérés de façon autonome par leurs responsables locaux, en général à travers des associations sans but lucratif. Par contre, les programmes, les contenus et les méthodes d’enseignement sont concertés avec nous.

Une « Section clinique » s’est ouverte l’an dernier à Bordeaux, avec plein succès. Le Dr Rabanel a voulu en créer une à Clermont, et je lui ai donné mon appui.

S’il était possible à l’Université de Clermont-Ferrand de mettre des locaux à la disposition de ce projet, je souhaiterais vivement qu’elle le fasse. A mon sens, un véritable intérêt public s’attache en effet à la divulgation d’un enseignement méthodique et rationnel de la psychanalyse : le désir de « réaliser sa personnalité » permet des exploitations éhontées ; on ne peut supprimer ce désir, que nourrit le « désenchantement » moderne ; mais on peut l’orienter vers une discipline de vérité, qui n’est pas incompatible avec une perspective scientifique, et qui a sa place dans l’Université : la discipline analytique.

Multiplier des « Départements universitaires de psychanalyse » serait souhaitable ; à défaut, l’Université, en aidant les « Sections cliniques », peut jouer un rôle salubre.

Veuillez agréer, Monsieur le Doyen et cher collègue, les assurances de ma haute considération,

Jacques-Alain Miller

dimanche 2 décembre 2007

Communiqué 9 & 10

“VITE ET BIEN”

lna 8 : se réinventer

mi décembre

colloque déprime dépression

1er et 2 février au ministère de la santé

grand meeting pour que vive la psychanalyse

9 et 10 février à la mutualité

Communiqué n°9

Chers collègues, Sollers sera comme BHL au Meeting de la Mutualité, il en a assuré Agnès Aflalo samedi matin sur le marché d’A. à Paris. Le Forum qui vient de s’achever laissera un bon souvenir à ceux qui ont pu y assister ; il a duré 2 heures de plus que prévu (jusqu’à 20h.15) ; tout le monde a pu parler ; les représentants des psychothérapeutes relationnels étaient partis avant leur tour de parole, tardif il est vrai. Le Colloque “Déprime Dépression” de janvier se tiendra dans l’amphithéâtre Pierre-Laroque du Ministère de la Santé, qui ne contient que 250 places ; dans ces conditions, on n’y assistera que sur invitation, et la plupart d’entre vous n’y aura pas accès. La déception que vous pouvez en ressentir doit être tempérée par deux considérations : 1) les Actes en seront publiés sous forme de livre (Seuil, collection “Le Champ freudien”) ; 2) la salle de la Mutualité réservée pour le Meeting des 9 et 10 février peut contenir jusqu’à 1 000 personnes. Je vous tiendrai au courant au fur et à mesure de la préparation de ces 2 événements, et de la prochaine sortie de LNA. Je signale à votre attention la très remarquable interview de Catherine Clément sur Lévi-Strauss, parue hier dans Le Journal du Dimanche, qui publiait également l’indispensable “Journal” de Sollers ; un écho du même JDM indiquait que le dernier livre de BHL se vendrait moins bien que les autres : ce serait dommage, je dirai pourquoi dans le prochain LNA. Je suis dans Elle paru aujourd’hui, page 44, sur la dépression : c’est mon hebdo favori. Bien à vous, Jacques-Alain Miller, le 26 novembre 2007

Communiqué n°10

Chers collègues, l’organisation du Colloque a été calée vendredi matin le 23 novembre, lors d’une réunion ad hoc au Ministère de la Santé, convoquée par le directeur du cabinet, présent avec 3 membres de son cabinet et une responsable de la DGS. Néanmoins, la conseillère m’a appelé cet après-midi, pour me demander de décaler légèrement le Colloque. Après consultation, nous avons arrêté la date, définitive je l’espère, des 1er et 2 février. Je vous communiquerai prochainement le programme. Bien à vous, Jacques-Alain Miller, le 26 novembre 2007